تختفي الأسود لكنها لا تموت
بهذا العنوان الرائع الذي نشر في جريدة (لوسوار دالجيري)-مساء الجزائر-
كتب مجموعة من اصدقاء المرحوم: محمد رافع باباغيو-المدير العام الجهوي السابق لمجموعة سونطراك للغاز و البترول بحاسي الرمل- الأغواط - الجزائر.
و اشهد انني لم اقرأ إلا نادرا ، مقالا بمثل هذه الروعة و السموق و الأدب الرفيع و صدق المشاعر في التابين فقد كُتب المقال بحب و اعتراف كبير بفضل الرجل و تفانيه الشديد في خدمة وطنه الجزائر و بلدته الأغواط ، دون ان يعرب عن ذلك يوما.
و لا انسى ان اقدم الشكر الجزيل لأخينا و استاذنا سي محمد الحاج عيسى الذي امدنا بالمقال الذي نشر اليوم في الجريدة ،و قد تفضل بإعادة نشره بمدونته (محمد الحاج عيسى) ..
لكي لا اطيل عليكم انشر لكم المقال كما جاء بلغته الفرنسية لكي لا تفقده الترجمة رونق عبارته الجزلة كما ارادها الكاتب.
ARTICLE
PUBLIE PAR "LE SOIR D’ALGÉRIE" LE 4 MARS 2018
«Les lions ne meurent pas, ils disparaissent.»
(Proverbe amazigh)
Mohamed Rafaâ
Babaghayou a été rappelé à
Dieu alors que rien ne le présageait. L’Algérie à travers la famille du pétrole
et du gaz perd un de ses enfants, un de plus dirons-nous mais chaque ami est,
en fait, un frère de combat dans toutes les luttes que nous avons menées sur le
front du développement avec, pour seul récompense, le feu sacré de voir
l’Algérie réussir.
Il m’est échu le difficile privilège de recueillir les témoignages nombreux et
francs. On aura tout dit de ce digne fils de l’Algérie profonde. La perte de
Mohamed Rafaâ est, à bien des égards, un condensé de ce que chacun d’entre nous
a traversé dans son parcours. Il aura connu la gloire, il aura connu la
souffrance digne, il aura connu l’ingratitude des hommes qui fait que l’on
mette à la retraite un jeune homme de 57 ans alors qu’il était dans la
plénitude de ses moyens. Il aura connu tout cela mais il a toujours su rester
digne. De cette dignité de l’Algérie profonde, en l’occurrence sa terre
nourricière que fut Laghouat cette porte du désert qui paya le prix de la
dignité en 1852 lors de l’invasion coloniale. Ce pays de longue peine, pays du
flanc de la dune où glissent les fennecs, pays aurait dit
Lacheraf.
Lacheraf.
Mohamed Rafaâ Babaghayou n’a pas jailli du néant, il a fait le parcours complet
du combattant du développement pétrolier en en gravissant toutes les échelles.
Il est né un 24 février, date prémonitoire s’il en est pour témoigner d’un
destin hors du commun. Il rendit l’âme à deux jours près du 24 février. Il
démarra toute sa carrière à partir d’un 24 février qui fut, à bien des égards,
un marqueur identitaire. Qui se souvient du fameux coup d'éclair dans un ciel
serein que fut la décision de Houari Boumediène qui annonçait à la face du
monde par son mémorable «Kararna ta'emime el mahroukate» «Nous avons décidé
souverainement de nationaliser les hydrocarbures». La réussite de l'Algérie
donna le la pour tous les autres pays pétroliers pour le recouvrement de leur
souveraineté économique. Ayant fait partie de cette génération de pionniers des
années 1970 qui avaient le feu sacré. A l’instar d’Obélix qui est tombé dans la
marmite de potion magique quand il était petit, nous sommes tombés dans le
chaudron du pétrole potion aussi magique que stimulante ce qui nous a permis de
décupler nos forces. Comme Mohamed Rafaâ, nous avons cru et donné le meilleur
de nous-mêmes car il y avait une utopie mobilisatrice. 1971 la force de frappe
de toute l’Algérie (environ un millier de diplômés se trouvaient à Cherchell).
Après le discours, toute cette intelligence était répartie sur les différents
challenges du pays (hydrocarbures, Trans-saharienne, Barrage vert, les 1 000
Villages agricoles, l’éducation, l’université, la santé militaire). Tout était
à construire, tout était à inventer. Les nombreux témoignages que je résume
convergent tous à la fois sur la personnalité de l’homme et sur ce qu’il a
donné au pays d’un autre pétrolier actuel dirigeant de Sonatrach mérite d’être
rapporté. Je suis sorti après lui de l’Ecole polytechnique. C’était un
visionnaire, avec toujours le meilleur pour sa compagnie. Ainsi, quand on a
commencé à imaginer la nécessité d’engineering Condor, il m’a vivement
encouragé car pour lui une grande société pétrolière devait nécessairement
avoir une référence dans le domaine de l’engineering..
Après le lycée où il fut brillant, ce sera l’Ecole polytechnique qui fut l’alma
mater de la technologie du pays, il avait comme amis des condisciples qui
furent des cadres émérites de la promotion 1969-1970. J’étais leur aîné, et
leur enseignant de TP de raffinage et de pétrochimie. Je garde de lui le
sentiment d’un boute-en-train toujours avec le bon mot, pétillant
d’intelligence. Il fera ensuite l’IAP en raffinage en 1971 avant de se
retrouver en caserne. Accueilli en 1971 à Hassi Messaoud puis à Hassi R'mel
durant la période difficile de son développement en tant que chef de région et
enfin celle non moins difficile en tant que DGA hydrocarbures. La suite est connue,
il sera vice-président de l’amont. Il fallait tenir tête à toutes les
entreprises étrangères et notamment françaises. Bien plus tard, dans une
carrière qui ne fut pas de tout repos, Mohamed Rafaâ eut aussi à affronter,
comme le rapporte un des amis, avec lequel il a galéré, l’hydre terroriste du
début des années 90 alors qu'il résidait à Dergana, où, par un beau matin, il
s'est fait braquer par un groupe de terroristes qui lui ont laissé la vie sauve
par miracle après lui avoir volé son véhicule. Dans les années 1990 difficiles
: beaucoup de compagnies pétrolières nous rendaient la vie difficile sachant
combien nous tenions alors à les garder actives en Algérie.
Mohamed Rafaâ acceptait de négocier jusqu'à une certaine limite, mais quand cela devenait inacceptable avec du chantage presque, il disait alors non, avec les termes du terroir suivant : «Tebki mou, matebkich ma.» (Que sa mère pleure mais pas la mienne). On aura compris sa mère, c’était l’Algérie.
Mohamed Rafaâ acceptait de négocier jusqu'à une certaine limite, mais quand cela devenait inacceptable avec du chantage presque, il disait alors non, avec les termes du terroir suivant : «Tebki mou, matebkich ma.» (Que sa mère pleure mais pas la mienne). On aura compris sa mère, c’était l’Algérie.
Pour un autre compagnon, c’était un patriote d'une intégrité exemplaire. Il a
quitté Sonatrach trop tôt, il nous quitte trop tôt. Il pouvait donner encore
beaucoup à Sonatrach et au pays. Ce pays si injuste et ingrat avec ses enfants
qui l'aiment sincèrement et se sacrifient pour lui. Mohamed Rafaâ Babaghayou
était à l'avant-garde du combat. Il apportait toutes les ressources de sa
compétence et de son intelligence avec passion. Toujours souriant avec cette
sérénité propre aux gens du Sud et sa grande générosité, l'attention qu'il
portait aux plus faibles..
Un homme dans tous les sens du terme, un pionnier des années 1970 au cours
desquelles il faisait partie d'une poignée de jeunes cadres appelés à assurer
la continuité de la production pétrolière et gazière au lendemain des
nationalisations. Un homme dont l'honnêteté, la foi, la droiture, la sincérité,
les compétences, le patriotisme et l'ouverture d'esprit durant toute sa
carrière jusqu'au départ de sa retraite en 2005, sont reconnus de tous.
l’homme pétri d’humanité
Peu connaissent sa
finesse, sa connaissance de la culture algérienne du Sud. Cet enfant des
Hauts-Plateaux avait hérité d’une longue tradition de savoir-être et
d’hospitalité. A chaque situation, il citait le proverbe qui convenait. Sa
rigueur avait peu d'égale ; il était intraitable quand il le fallait, mais il
pouvait être capable d'une grande empathie quand il voyait quelqu'un en
difficulté ; bien plus, sa compassion se traduisait toujours par des actes
concrets, ne serait-ce que par les mots qu'il fallait pour adoucir la situation.
Mohamed Rafaâ était profondément religieux, pas de cette religion de
l’ostentation du m’as-tu vu, celle de l’Islam lumineux, tolérant. C’était aussi
un exemple d’intégrité, un exemple par tant d’autres qualités, il remettait
systématiquement les clés des multiples appartements qu’il a occupés au cours
de sa carrière.
Il avait enfin une capacité de travail remarquable en termes de rigueur. Pour un autre de ses nombreux amis, «c’était un météore, une valeur élevée, il a prêté ses vertes années au développement de Hassi R’Mel, moi je dirai qu’il avait sacrifié sa jeunesse, son énergie et, plus encore, son bonheur familial au service d’un honorable idéal : l’algérianisation à outrance de l’encadrement de l’amont des activités hydrocarbures. Je garde l’image d’un homme accompli, modeste et d’une correction qui frise la manie. Mohamed est un homme qui a «le cœur sur la main». Une vertu qui lui a valu déférence et affection de la part de ses proches collaborateurs et des plus humbles hommes de tâche.
Il avait enfin une capacité de travail remarquable en termes de rigueur. Pour un autre de ses nombreux amis, «c’était un météore, une valeur élevée, il a prêté ses vertes années au développement de Hassi R’Mel, moi je dirai qu’il avait sacrifié sa jeunesse, son énergie et, plus encore, son bonheur familial au service d’un honorable idéal : l’algérianisation à outrance de l’encadrement de l’amont des activités hydrocarbures. Je garde l’image d’un homme accompli, modeste et d’une correction qui frise la manie. Mohamed est un homme qui a «le cœur sur la main». Une vertu qui lui a valu déférence et affection de la part de ses proches collaborateurs et des plus humbles hommes de tâche.
Encore cette conclusion pour l’homme d’exception que fut Mohamed Rafaâ, c’était
un être entier, mêlant rigueur, intelligence, clairvoyance et esprit, tout en
finesse. Technicien hors pair et honnête homme au sens premier du terme. Si
nous devions encore nous souvenir du 24 février 1971, ce serait pour magnifier
le souvenir d’êtres comme Mohamed Rafaâ, un acteur incontournable de la
réussite de l'immédiat après le 24 février.
Repose en paix, Mohamed Rafaâ. Tu as fait ton devoir dans toute la noblesse du
terme. Nous n’oublierons pas ton combat pour une Algérie fascinée par l’avenir
et qui doit garder son rang dans un monde de plus en plus difficile.
Ses amis : Nazim,… Mohamed, Chawki, Nacerdine, Chems Eddine et les nombreux autres...